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Tourisme médical

ou comment se soigner quand on est nomade et qu'on vit en camping-car ?

En fait, ce n'est pas la vie en camping car qui pose problème, mais le système médical français dont le covid a révélé les failles.


En janvier 2021, j'ai fait ma première radio de la hanche. Mon médecin traitant alsacien m'a envoyé prendre un avis chirurgical dans la foulée. Je n'étais à l'époque pas prête à me faire opérer, pas à prête à m'arrêter de travailler. Deux ans plus tard, mon avis sur la question a bien sûr évolué.



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Nous vivons depuis un an et quatre mois en camping-car et pour profiter du vaste monde, il vaut mieux pouvoir marcher. Comment profiter d'une ville baroque sicilienne perchée sur les hauteurs quand on arrive à peine à marcher 1 km les bons jours ? Adieu façades baroques, vues merveilleuses sur la mer, cathédrales normandes, temples grecs, amphithéâtres romains… J'étais totalement focalisée sur un unique souci : comment vais-je accéder au vieux centre-ville ? Denis pourra-t-il manœuvrer un camping-car de plus de 7, 50 m dans ces ruelles étroites pour me déposer au centre ? Arriverai-je à monter les 235 marches pour accéder à l'esplanade de la cathédrale baroque de Modica ?

Mon "pas question de me faire opérer" s'est rapidement transformé en : "quand ? Et surtout, le plus rapidement possible".



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Je me suis quand même posée d'innombrables questions. Suis-je prête à remplacer un de mes os par un misérable morceau de plastique ou de titane ? Vais-je faire sonner les portiques de sécurité des aéroports ? Vais-je devenir une femme "augmentée" selon les théories chères aux transhumanistes ou un humain diminué ? Vais-je perdre du poids en remplaçant un de mes os ? Et dans ce cas, privilégier le plastique moins lourd ?

Oui, je sais, ces profs à toujours se poser des questions!


Une fois la décision prise, commence le parcours du combattant. D'abord, j'ai mis 6 mois à convaincre mon généraliste de Tours que je souffrais bien au niveau de la hanche et non du dos. Le match généraliste-dos contre moi-hanche s'est achevé par le score 3 (chirurgien orthopédiste, radiologue, moi) - 1 (généraliste). Qui a dit que la médecine était une science exacte ?


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Deuxième difficulté : ne louper aucune étape du parcours préopératoire. J'ai dû faire un tableau Excel ! Par exemple, la radio des dents doit avoir moins de deux mois, le rapport du cardiologue moins de 5 mois, le test covid moins de deux jours, le test staphylocoque doré 15 jours etc. Bref, de quoi perdre la boule (la hanche ?) avec toutes ces contraintes. Ils m'ont même expliqué comment m'épiler, avec quoi, comment me laver, avec quel produit… Mon dossier préopératoire est plus épais qu'une thèse ! Rebutée par le nombre excessif de démarches, j'ai songé à m'opérer moi même. L'orthopédie, c'est facile : un bon couteau pour découper les chairs ou une scie bien affûtée, une ou deux vis, une imprimante 3D pour fabriquer le nouvel os, une jolie broderie pour refermer le tout et le tour est joué ? Puis, j'ai réfléchi. Au vu de mes difficultés personnelles à ouvrir proprement un simple paquet de pâtes, ne devrais-je pas laisser faire un spécialiste ? Après, ces "fameux" spécialistes n'inspirent pas forcément la confiance. J'ai dû signer tellement de décharges avec des listes longues comme le bras de choses qui pouvaient mal se passer que j'ai commencé à douter du monde médical. Mon opération serait-elle plus dangereuse que prévue ? Faut-il s'inquiéter comme l'écrivent les journalistes à la quête de sensationnel ? Même le laboratoire m'a fait signer une décharge pour m'envoyer par mail mon groupe sanguin. Mon groupe sanguin serait-il classé secret défense ? Le fait de devoir choisir une personne de confiance pour prendre les décisions à ma place en cas d'incapacité, ne plaide pas non plus en faveur de la confiance. Si la clinique m'avait demandé de rédiger mon testament, là j'annulais purement et simplement l'opération.


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Troisième difficulté : obtenir un rendez-vous chez un spécialiste dans les délais exigés pour une bonne préparation de l'opération. A Tours, je n'ai trouvé aucun rendez-vous de cardiologie ou de dentiste dans les délais. J'ai bénéficié de l'aide d'amis rencontrés au Maroc qui m'ont trouvé des rendez-vous à Marseille. Donc je suis imbattable au sujet de Marseille : ses calanques, le vieux port, la Canebière, la Bonne Mère, la petite sardine qui a bloqué le port, son cardiologue, son dentiste. En plus d'être une touriste ordinaire, je pratique depuis trois mois le tourisme médical. J'ai d'ailleurs réalisé un schéma de mon tourisme médical. Une bonne habitude de géographe !




Vivre en camping-car, c'est la liberté absolue ? Oui, à condition de ne pas avoir besoin de se faire soigner ! J'espère que tous mes déplacements anarchiques ne m'ont pas fait perdre la boussole, le nord; que le chirurgien n'ait pas perdu la sienne et m'opère bien de la hanche gauche. Je songe très sérieusement à tracer une flèche sur la hanche à opérer et une croix sur l'autre. On n'est jamais trop prudent !

3 Comments


Angèle KELLER
Angèle KELLER
Feb 08, 2023

Hello, quel parcours stupéfiant, un vrai casse-tête. Bon courage pour la réalisation des étapes

Angèle

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Dominique
Dominique
Feb 08, 2023
Replying to

Merci beaucoup, Angèle. J'arrive presque au bout de mon périple. Du coup, nous sommes en "vacances" en Bretagne et j'essaye d'oublier les contraintes qui vont peser sur nous dans les prochains temps. Ce n'est que pour mieux nous lancer dans de nouveaux projets. 😉😇

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Bon courage à toi chère Dominique pour les semaines à venir !

Gros bisous

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© 2023 Dominique et Denis KRAUTH

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